Sortir de sa zone de confort ou élargir sa zone de confort?
Il y a quelques jours, j’ai encadré une séance de coaching un peu particulière.
Pour sa troisième séance d’accompagnement, j’ai proposé à mon client de faire une via ferrata. Et pas n’importe laquelle. Une via difficile (D) à très difficile (TD), de deux heures environ. Sa première via ferrata…
Pourquoi ?
Tout simplement pour enrayer les schémas d’évitement qui le limitent. Ceux-là même qui font dire à mon client « je n’ai pas envie », « je n’aime pas », « ce n’est pas pour moi »… ou « j’aimerais mais… », alors qu’il n’a jamais essayé les activités ou options que je lui propose.
Bon nombre de ces schémas reposent sur la peur. La peur de faire, la peur d’échouer, ou la peur d’avoir peur – oui car on peut bien avoir peur d’avoir peur quand l’on ne s’est jamais véritablement confronté à cette émotion !
Or la peur n’est pas une émotion à éviter ou à supprimer mais plutôt à apprivoiser. Tous les sportifs de l’extrême, qu’ils soient skieurs de pentes raides, alpinistes, pratiquants de wingsuit ou plongeurs de falaises, éprouvent de la peur et disent en avoir besoin. Étonnamment, elle les rassure et les assure. Ne plus ressentir la peur serait paradoxalement une mise en danger.
La peur révèle nos limites du moment. Elle vient nous inciter à la prudence. Connecter la peur c’est avoir l’opportunité de répondre à la question: « Comment peux-tu procéder avec vigilance afin de réussir de façon sûre et sans danger ? »
Peur et confort
Éprouver la peur face à une situation donnée c’est comprendre que l’on se situe en dehors de notre zone de confort. Cela ne veut pas forcément dire qu’il ne faut pas faire. Cela permet souvent de réaliser qu’il y a une possibilité d’agir, avec prudence. Et chercher à agir en créant, peu à peu, du confort dans l’inconfort, est bien différent que d’agir en restant dans l’inconfort le temps que cela passe. Cela permet d’élargir notre zone de confort en apprenant et en reprogrammant certains schémas limitants.
La veille de notre séance, mon client, qui a peur du vide, avait réussi à sauter d’un plongeoir de 5m. Il m’a avoué s’être élancé sans réfléchir, sans regarder en bas et en serrant les dents. Il a pu faire ce pas dans le vide grâce à sa détermination et à sa force mentale. Mais à moins de répéter de nombreuses fois ce même saut ou de changer de stratégie, il y a fort à parier que cette situation reste inconfortable pour lui pendant un moment. C’est ce que j’appelle « sortir de sa zone de confort ». Un acte héroïque qui booste l’estime de soi et la confiance en soi, mais qui peut épuiser.
Maîtriser le reptilien
Évoluer pendant deux heures sur une paroi, à 200m du sol, offre la possibilité de vivre le stress (ou la peur) sur une durée suffisamment longue pour que la mise en place de stratégies d’adaptation soit nécessaire. Il n’y a pas d’autre choix. Céder à la réponse reptilienne « fight or flight » – « fuite ou combat », n’est pas une option.
Dans ce cadre, la respiration offre deux clés importantes.
La première est la possibilité d’être complètement présent à ce qui se joue, à ce que l’on ressent et aux réactions autonomes qui se mettent en place. Revenir à sa respiration en ressentant le trajet de l’air dans ses narines, ou le mouvement de son ventre, par exemple, est un moyen pour apaiser le mental et les émotions. C’est prendre un peu de distance avec l’évènement stressant comme pour mieux apprécier l’enjeu. C’est se donner la possibilité d’agir plutôt que de réagir.
La seconde est le prolongement de la première puisqu’il s’agit de maîtriser les réactions nerveuses, biochimiques et physiologiques qui se mettent en route inconsciemment. Car face au stress, et sous l’influence de l’adrénaline et du cortisol, la respiration s’accélère, la fréquence cardiaque augmente, le glucose afflue, les muscles se préparent à l’action…le corps entier se mobilise pour faire face ou pour fuir. Contrôler sa respiration, en allongeant l’expiration notamment, relâcher ses tensions musculaires, rester calme et souple – dans sa tête et dans son corps…sont autant de stratégies qui permettent de trouver le confort.
Ainsi nous sommes disponibles, en alerte mais pleinement conscients et rationnels, en capacité d’apporter la juste réponse à la situation. C’est ce que j’appelle «créer du confort dans l’inconfort ». Une stratégie qui permet une adaptation et un apprentissage durables et qui rend véritablement « plus fort ».