Depuis Lille, à deux jours du départ du Tour de France, une petite révolution s’est amorcée—pas sur les pédales, mais dans les poumons.
Hier, Patrick McKeown, auteur du livre Oxygen Advantage (que j’ai eu le plaisir de traduire en français), s’est exprimé devant 250 professionnels du cyclisme lors de la conférence Science & Cycling. Entraîneurs, chercheurs, coureurs, staffs médicaux : tous réunis autour d’un sujet longtemps négligé… mais désormais reconnu comme un marqueur clé de la performance : la ventilation.
Une respiration trop intense, un frein à la performance
Certains coureurs porteront désormais des maillots capables de mesurer en temps réel la fréquence respiratoire et le volume minute (la quantité d’air inspirée par minute). Un indicateur fondamental, car une ventilation excessive est souvent le signe d’un seuil ventilatoire dépassé… et d’une performance en chute libre.
Autrement dit : ce n’est pas forcément le cœur qui lâche, ni les jambes qui cèdent, mais la respiration qui sature.
Seuils ventilatoires et zones d’entraînement : un dialogue essentiel
Dans la planification sportive, on parle de zones d’entraînement (zone 1 à 5), construites à partir de la fréquence cardiaque, de la puissance ou de la vitesse.
En parallèle, on identifie deux seuils ventilatoires :
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VT1 (seuil aérobie) : première rupture de pente, quand la respiration commence à s’accélérer pour gérer le CO₂. Il marque la transition entre endurance fondamentale (zone 2) et endurance active (zone 3).
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VT2 (seuil anaérobie) : deuxième rupture, où la ventilation explose, signe d’un déséquilibre métabolique (accumulation de lactates, chute du CO₂, hyperventilation). Il correspond à la zone 4-5.
👉 En travaillant sa respiration, on peut retarder ces seuils, les rendre plus tolérables, et gagner en économie respiratoire dans chaque zone d’effort.
Pourquoi entraîner sa respiration ?
Parce qu’elle est au carrefour de toutes les fonctions de la performance : mécanique, biochimique, nerveuse, émotionnelle.
Voici ce qu’un travail respiratoire structuré peut vous apporter :
🔹 Sur le plan fonctionnel et postural
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Mobilité et stabilité du diaphragme
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Amélioration de la posture (axe tête-cage thoracique-bassin)
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Meilleure efficacité gestuelle et coordination
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Prévention des blessures par une meilleure organisation du mouvement
🔹 Sur le plan biochimique et énergétique
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Augmentation de la tolérance au CO₂
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Amélioration de la diffusion de l’O₂ vers les tissus
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Retard de l’acidose métabolique (moins de lactates, moins de souffrance) et du réflexe métabolique
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Meilleure gestion de l’effort prolongé ou fractionné
🔹 Sur le plan mental et neurovégétatif
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Capacité à rester lucide sous pression
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Amélioration de la concentration et de la présence
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Meilleure gestion du stress et des émotions en compétition
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Récupération et sommeil optimums
🔹 Sur le plan vasculaire, digestif et global
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Amélioration du retour veineux par la pompe diaphragmatique
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Soutien à la digestion (mécanique et neuro-régulation) et réduction des troubles digestifs liés au stress ou à l’effort
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Renforcement de la résilience générale (immunité, adaptation au froid/au chaud/à l’altitude)
🔹 Sur le plan de l’économie de l’effort
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Réduction de la ventilation minute à intensité équivalente
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Retard de l’essoufflement dans les phases clés de l’épreuve
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Amélioration de la récupération intra-effort (entre les séries, entre les matchs)
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Meilleure régulation de la dépense énergétique et du rythme global
Un mot personnel
Patrick McKeown est un pionnier.
J’ai eu la chance de me former à ses côtés, et de traduire son livre Oxygen Advantage (disponible ici).
Aujourd’hui, je suis fier de contribuer, via la Breathing Academy au déploiement de cette révolution respiratoire…
La Breathing Academy ne se limite pas à enseigner une méthode. Nous essayons de nous inspirer de différentes approches, passées au crible de notre expérimentation personnelle, et des apports complémentaires de différentes spécialités, au croisement de la physiologie, de la pratique respiratoire, des neurosciences et du terrain.
Ainsi nous explorons :
✅ Les grandes approches existantes (Oxygen Advantage®, Pranayama, Buteyko, etc.)
✅ Les publications scientifiques les plus récentes
✅ Les préférences motrices et respiratoires
✅ Les expériences croisées d’athlètes, d’entraîneurs, de soignants et de thérapeutes
Notre conviction : la performance n’a de valeur que si elle respecte l’athlète — maintenant, et pour le reste de sa vie.
❓ FAQ
Pourquoi la respiration est-elle importante en sport ?
Parce qu’elle est directement liée à l’endurance, la récupération, la gestion du stress, la coordination, et l’économie de l’effort. Une respiration mal maîtrisée entraîne souvent une fatigue précoce, un déséquilibre biochimique (acidose, hyperventilation), et une perte d’efficacité.
Qu’est-ce qu’un seuil ventilatoire ?
Il s’agit d’un point de rupture dans la régulation respiratoire pendant l’effort.
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Le VT1 (seuil aérobie) correspond à la première accélération de la ventilation pour éliminer le CO₂.
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Le VT2 (seuil anaérobie) marque l’hyperventilation, où l’organisme peine à compenser l’acidose métabolique.
Ces seuils permettent de mieux cibler les zones d’entraînement.
Quelle différence entre zone cardiaque et zone ventilatoire ?
Les zones cardiaques sont calculées à partir de la fréquence cardiaque maximale (FC max), tandis que les zones ventilatoires s’appuient sur l’intensité à laquelle la respiration se modifie.
👉 Bien que liées, les deux approches peuvent différer : certaines personnes ventilent trop tôt par rapport à leur rythme cardiaque. D’où l’intérêt de travailler la respiration.
Peut-on améliorer ses seuils ventilatoires ?
Oui. Grâce à un travail respiratoire adapté :
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renforcement du diaphragme
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amélioration de la tolérance au CO₂
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apnées dynamiques
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respiration nasale à l’effort
Ces pratiques permettent de retarder la saturation respiratoire, améliorer la récupération et économiser l’effort.
Quels sont les bénéfices d’un travail respiratoire global ?
Ils sont multiples :
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Posture et stabilité
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Endurance et gestion de l’effort
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Clarté mentale et résilience
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Qualité de sommeil et récupération
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Optimisation du geste sportif
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Moins de blessures, moins de stress, plus de constance
Comment savoir si ma respiration est limitante ?
Certains signes sont révélateurs :
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essoufflement rapide à l’effort modéré
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difficulté à respirer par le nez
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fatigue chronique ou mauvaise récupération
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respiration haute et rapide
Un test simple : le BOLT score (temps de rétention après expiration). Un score inférieur à 20 secondes signale souvent un besoin de rééducation respiratoire.